Otman Mersali, l’épieur de l’ombre

La peinture à Otman Mersali procède par grandes touches. Elle relève d’un style impressionniste bien sûr et, la filière des professeurs de l’école d’Oran est connue pour cette tendance. Pour rappel, à Alger, les enseignants, avaient versé dans la recherche identitaire avec les ateliers Mesli, Martinez, Ali Khodja, Issiakhem et le reste. Bref ! Chez Mersali, c’est un peu autre chose : son impressionnisme à lui, est assez différent de la démarche qui découle de l’école universelle. Celui notamment à Claude Money ou Auguste Renoir, et autres impressionnistes qui ont découvert la prouesse extraordinaire de quitter les ateliers afin d’aller chasser la lumière longtemps non valorisée. Pour un bref rappel, sur le plan formaliste, l’impressionnisme est venu afin d’en finir avec l’académisme longtemps lourd et exalté. Ici chez l’artiste, c’est des touches assez épaisses qui ne cherchent plus la mobilité de la lumière et son éclat, mais autre chose, quelque chose qu’aucun ne soupçonnerait : l’ombre. Oui, l’ombre, et pas mal de spécialistes auront du mal à le croire. Mersali n’a même pas besoin d’aller guetter la lumière pour l’attraper et la fixer, ceci parce qu’il ne la cherche pas, tout simplement. L’objet peint nous le prouvant quand l’on approche la loupe. Comme un « coup d’état », disant un « coup d’éclat », contre le soleil lui-même, en fait. Chez lui, la touche est révélée en tant que  teinte interne, trouvée déjà sur la couleur initiale de l’objet, et s’en est cela d’essentiel ; la tache à travers sa conceptualisation, suffit amplement comme « matière esthétique ». La gamme des verts à côté des mauves et sa spécialité. Comme dans l’univers fauviste dissimulé, les teintes, dont le peintre a subtilement le secret, rehaussent du charme du rendu. Sur le plan thématique, le matérialisme urbain et sa magie- est tant souhaité mais non avancé au premier plan. Le plus important est l’exotisme, avec ces femmes aux haïks déambulant toujours à travers ruelles et remparts. L’artiste nous rappelle, subtilement qu’en matière de goûts, c’en est l’impressionnisme qui en sort brillamment, car plus séduisante comme école, plus attirante. Parfois, quand je regarde ses œuvres de plus près, j’aurais juré que l’artiste débarque du monde de l’architecture, et ce n’est pas le cas, puisqu’il avait été mon prof aux beaux-arts, et pendant longtemps.  Ou est-ce seulement un amour pour la sémiologie de l’espace. Ici, les labyrinthes et ruelles mauresques, la perspective (re) provoquée, et les souks en sont un simple rappel des images de la mémoire commune, que l’on tient comme un héritage improbable si riche à cacher. Un message, en fait, pour que notre patrimoine culturel, nos habits, et notre histoire algérienne de manière générale ne disparaissent jamais.

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